Gand, la belle Flamande
Que voir, que faire à Gand en Belgique ?
Située à deux heures de Paris, entre Bruxelles et Bruges, moins connue que ses voisines, Gand (Gent en flamand) est l’un des joyaux de la Flandre. Son architecture subjugue le promeneur, mais cette cité enrichie par l’industrie drapière et le commerce au Moyen Âge, a le bon goût de ne s’être jamais muséifiée.
Dynamique, entreprenante, étudiante (25 % de sa population), Gand, réputée en Belgique pour son esprit quelque peu rebelle, possède un caractère unique, à savourer le temps d’un week-end, entre balades le long des canaux, visites de musées et soirées dans les estaminets.
Avec, pour point d’orgue du séjour, la contemplation dans la cathédrale Saint-Bavon d’un chef-d’œuvre de la peinture occidentale : le retable de l’Adoration de l’Agneau mystique des frères Van Eyck.
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Au XIVe siècle, Gand, enrichie par l’industrie drapière et le commerce des céréales, connaît son âge d’or. La cité flamande, avec ses 60 000 habitants, est alors la deuxième ville la plus peuplée d’Europe après Paris. Situé au confluent de la Lys et de l’Escaut, le port fluvial de Gand, par lequel transitent marchandises et céréales, est à son apogée.
Aujourd’hui, les splendides façades du Graslei (quai aux Herbes), sur la rive droite de la Lys au cœur de Gand, témoignent de cette opulence. Feu d’artifice d’architecture flamande, alternant roman et gothique, le Graslei était la vitrine du vieux Gand, surnommé « la cuve » (Kuip), Le quartier, largement piétonnier, a conservé une concentration exceptionnelle de chefs-d’œuvre architecturaux, qui font voyager à travers les siècles.
Au cœur du Kuip, à l’ombre du beffroi (91 m de hauteur), symbole du pouvoir civil de Gand, et de sa magnifique halle aux draps gothique, l’imposant hôtel de ville, construit au fil des siècles, surprend par son caractère hybride faisant se côtoyer gothique, Renaissance et baroque. À proximité, deux autres tours rivalisent avec le beffroi : celles de l’imposante cathédrale Saint-Bavon (82 m de hauteur) et de l’austère église Saint-Nicolas, qui imposent le respect.
Tout autour, le vieux Gand, délimité par les rivières et le canal de la Lieve, déploie son lacis de ruelles truffé de merveilleux édifices légués par les patriciens et riches commerçants gantois.
Un festival de demeures à pignons aux façades flamboyantes, à admirer notamment le long de la rue Hoogpoort, près de l’hôtel de ville, du côté de la Burgstraat, avec l’étonnante maison aux médaillons sculptés des comtes de Flandre (n° 4), ou sur la grande place du marché Vrijdagmarkt (maison des Tanneurs), l’un des cœurs battants de la ville.
À la lisière du Kuip, deux forteresses médiévales font figure de vigies du vieux Gand. L’austère château de Gérard le Diable (XIIIe siècle) se reflète dans les eaux de l’Escaut, tandis qu’à l’opposé, à proximité de la Lys, Gravensteen fut pendant 300 ans la résidence des comtes de Flandre.
Érigée au XIIe siècle, elle fut largement reconstruite à la fin du XIXe siècle et n’a plus rien de véritablement médiéval. Sa visite audioguidée permet de flâner sur ses remparts et de découvrir son histoire ainsi qu’une collection d’instruments de torture !
Passez la nuit à Gand car les balades nocturnes y sont féeriques. Les rues, places et bâtiments du centre ancien sont superbement mis en lumière dès le crépuscule et jusqu’à minuit. L’un des plus beaux points de vue est le pont Saint-Michel, qui enjambe la Lys à la hauteur du Graslei. Plan et itinéraire (5 km, 2 h) téléchargeables ici.
Saint-Bavon et l’Agneau mystique de Van Eyck : des trésors universels
Fierté des Gantois, la cathédrale Saint-Bavon accompagne le destin de la ville depuis un millénaire. Plus ancienne église paroissiale de Gand, d’abord dédiée à saint Jean-Baptiste, elle fut agrandie au fil des siècles. Charles Quint y a été baptisé et Philippe II en a fait une cathédrale au XVIe siècle.
Largement gothique, elle a subi de nombreuses transformations tout au long de son histoire : sa crypte (XIIe siècle) est romane, ses impressionnantes trois nefs et son chœur en pierre bleue de Tournai sont gothiques, tout comme sa tour de 89 m de hauteur.
À l’intérieur, Saint-Bavon a tout d’un musée gorgé de trésors artistiques : jubé et autel baroques, chaire de vérité rococo, chef-d’œuvre de Rubens (L’Entrée de saint Bavon au cloître) et de Juste de Gand (Triptyque du Calvaire), colonnes romanes ornées de fresques dans la crypte…
Mais le plus précieux se trouve dans une chapelle du déambulatoire : le célébrissime polyptyque de l’Adoration de l’Agneau mystique, l’un des grands chefs-d’œuvre de l’art occidental peint par les frères Hubert et Jan Van Eyck au XVIe siècle. Une œuvre éblouissante par sa virtuosité et la flamboyance de ses couleurs, marquant un sommet de l’art primitif flamand.
Commandé par un couple de riches Gantois, ce retable monumental de 24 panneaux peints représente en son centre une scène d’adoration de l’Agneau de Dieu par un cortège d’anges et de personnages richement vêtus. S’appuyant sur l’observation minutieuse du réel et une maîtrise inégalée de la peinture à l’huile, l’œuvre des frères Van Eyck fait preuve d’une expressivité et d’un réalisme totalement révolutionnaires à l’époque.
Cette merveille, désormais protégée par un caisson vitré, a connu bien des vicissitudes depuis sa révélation en 1432. Au fil des siècles, le retable fut mutilé, démantelé, vendu, échangé, puis dérobé par les sans-culottes, pillé par les nazis avant d’être rendu à la cathédrale Saint-Bavon à la Libération. Sa restauration, en cours depuis 2012, lui a rendu tout son éclat. Cet Agneau mystique est un miracle, à tous points de vue.
Un centre des visiteurs a été aménagé dans la crypte de la cathédrale. Tout au long du parcours, les visiteurs sont guidés par un assistant numérique personnel virtuel (disponible en 9 langues) qui fait revivre avec des lunettes de réalité augmentée (RA) la tumultueuse histoire de la cathédrale et de son chef-d’œuvre. La visite (facultative) se fait avant de pénétrer dans la chapelle abritant l’Agneau mystique. Réservation obligatoire (16 € ou 12,50 € pour le tableau seul).
Musées de Gand : art, science, histoire et plus si affinités…
L’art à Gand est loin de se résumer au retable des Van Eyck. La ville compte plusieurs musées intéressants, la plupart situés dans le quartier sud (Zuid) à proximité de l’université.
Parmi les plus anciens du pays, le MSK musée des Beaux-Arts expose quelque 800 œuvres dans une bonne trentaine de salles, allant des primitifs flamands aux modernes, en passant par le baroque et les natures mortes du XVIIe siècle, les peintres paysagistes du XIXe siècle, ou les expressionnistes du XXe siècle. L’accent est notamment mis sur les artistes flamands avec des œuvres de Jérôme Bosch, Pieter Brueghel le Jeune, Rubens, Jordaens, Théo Van Rysselberghe, Roger Minne, James Ensor…
Juste en face, le S.M.A.K. (musée municipal d’Art contemporain) présente des expositions pointues depuis 1945 dans de grandes salles lumineuses. Les férus de science se rendront, quant à eux, au GUM (Ghent University Museum) dont les collections couvrent plusieurs disciplines, de la biologie à l’archéologie en passant par la psychologie et la médecine.
Plutôt intéressé par l’histoire ? À 10 min de marche, le STAM (musée de la Ville de Gand ), installé dans les bâtiments de l’abbaye et du couvent de la Bijloke (XIIIe siècle), retrace la saga de Gand, de la préhistoire au XXIe siècle. Le parcours, passionnant, commence par une photo aérienne géante de la ville installée au sol sur laquelle on peut marcher.
Et, s’il vous reste du temps, la liste des autres musées tient de l’inventaire à la Prévert : industrie, design, vie quotidienne d’autrefois, cabinet de Maeterlinck, histoire des traitements psychiatriques, galeries et centres d’art… Il y en a pour tous les goûts !
Si vous visitez plusieurs musées, la carte CityCard Gent vaut le coup. Valable 48h ou 72h, elle donne accès aux musées et aux transports en commun, comprend une balade en bateau sur la Lys, l’accès au « bateau-tram » hop on/hop off (1 jour) et la location d’un vélo pour 1 jour. Réduction pour l’Agneau mystique. Prix : 38 ou 44 € ; en vente à l’office de tourisme et dans les principaux musées.
Gand hors des sentiers battus : de belles balades urbaines
En dehors de son centre historique, Gand réserve quelques jolies surprises aux promeneurs. À proximité du Kuip, sur la rive gauche de la Lys, l’ancien quartier ouvrier du Patershol déroule ses ruelles pavées bordées de maisons à pignon.
Un coin tranquille et plein de charme, à deux pas de l’agitation touristique, avec des bars et des restaurants, mais aussi de belles demeures au cachet médiéval comme la maison Van Alijn, abritant un musée de la vie d’autrefois. Sur le même quai (Kraanlei), à la hauteur du pont qui franchit la Lys, s’élèvent deux splendides maisons baroques, dont l’une est décorée des Sept Miséricordes.
Jouxtant le Patershol, juste derrière le château des Comtes, le Prinsenhof n’a rien à envier à son voisin. C’est ici que les souverains flamands installèrent leur résidence au XVe siècle, aujourd’hui disparue.
Le quartier a conservé un certain cachet aristo et médiéval, avec ses belles bâtisses et son canal. Belle promenade à faire jusqu’au vieux béguinage Sainte-Elisabeth, un havre de paix avec ses vénérables demeures de brique rassemblées autour d’une église baroque.
Changement d’atmosphère et d’époque au sud du vieux Gand (Zuid), où s’élèvent de beaux édifices baroques ou classiques, comme l’opéra et le palais de justice sur la place du Kouter. Des témoignages de la bourgeoisie triomphante à la suite de la Révolution industrielle du XIXe siècle et de l’essor des filatures qui firent la richesse de Gand… mais aussi la misère de milliers d’ouvriers travaillant dans des conditions indignes. Dans le même quartier, l’immeuble du Vooruit, aujourd’hui centre culturel, témoigne aussi de l’importance du mouvement ouvrier local au début du XXe siècle.
Aujourd’hui, l’ère industrielle est révolue, et le port de Gand, toujours en service, a été installé au nord de la ville. Les anciens docks (Oude Dokken), en voie de réhabilitation, accueillent immeubles résidentiels, espaces verts et entreprises de services au bord de l’eau. Un parcours de visite permet de les découvrir. Un visage du nouveau Gand post-industriel, à l’instar des œuvres de street art qui décorent certains quartiers de la ville, dont la Werregarenstraatje surnommée « la ruelle aux graffitis ».
Si l’empereur Charles Quint (1500-1558) est natif de Gand, il ne fut guère tendre avec la ville à laquelle il supprima liberté et privilèges. Ces mesures suscitèrent une révolte des Gantois qu’il mata sans pitié. Pour humilier les révoltés, dont certains furent décapités et brûlés vifs, des dizaines de notables locaux furent forcés de s’agenouiller devant lui, avec une corde autour du cou. D’où le surnom des Gantois, « Stroppendrager », littéralement les « porteurs de corde », symbole d’insoumission et de résistance.
Gand gourmande et festive
Avec près de 75 000 étudiants, ce qui en fait la plus importante cité universitaire de Belgique, Gand est une ville très dynamique et vivante. Bars, cafés, estaminets, restos abondent dans le Kuip, du côté de Saint-Bavon, Vrijdagmarkt et Sint-Jacobskerk, sur les quais de la Lys et dans le quartier de Patershol, sans oublier celui de l’Université.
Goûtez aux spécialités gantoises, comme le fameux waterzooi de poulet ou de poisson, ou à la délicieuse carbonade, sans oublier la moutarde artisanale Tierenteyn-Verlent (à base de grains noirs et servie à la louche) et les cuberdons, des friandises coniques au sirop de framboise. Gand possède aussi un bon nombre de tables véganes ou végétariennes. En 2009, elle fut d’ailleurs la première ville au monde à lancer les « jeudis végétariens » dans ses restaurants.
Comme partout en Belgique, la bière fait l’objet d’un véritable culte et les temples dédiés au dieu houblon ne manquent pas. Pour des mousses couleur locale, poussez la porte de brasseries gantoises comme Gruut, qui produit sa bière à base d’épices, la brasserie Artevelede, ou Stroom qui utilise une énergie 100 % renouvelable. Un parcours guidé (Ghent Scenic Craft Beer Walk) permet de les découvrir.
De la bière à la fête, il n’y a souvent qu’un pas et Gand le prouve aisément, surtout lors des Fêtes de Gand en juillet. Pendant dix jours (du 19 au 28 juillet 2024), des foules joyeuses investissent le centre-ville pour assister à toutes sortes de spectacles (concerts, théâtre de rue, bals...) et d’animations. L’un des événements phares de l’agenda festif gantois avec le Gent Jazz Festival (5-20 juillet 2024), les fêtes du Patershol (9-11 août 2024), le festival de Flandre (musique classique, 10-26 sept), le festival du film de Gand (8-19 octobre 2024) ou le Jazz au Parc.
Envie d’un bon cornet de frites ? Alors direction une petite échoppe adossée à la Vleeshuis, la friterie de Filip (Frituur Bij Filip, Pensmarkt 8, tlj 11h30-20h30 sauf mercredi) qui concocte des frites croustillantes à souhait (2,50 €), considérées parmi les meilleures de Belgique. Aucune enseigne pour la repérer, mais une longue file d’attente !
Fiche pratique
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Comment y aller ?
Depuis Paris-Nord : Eurostar jusqu’à Bruxelles-Midi (20 liaisons/jour en 1h22, à partir de 29€) et train IC jusqu’à Gand. Compter 2 h 10 de voyage en tout.
Bruxelles-Midi est également reliée à de nombreuses gares françaises (Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Rennes, Strasbourg…).
Bonnes adresses
– Comic Art Hotel : Augustijnenkaai, 2. Un havre de paix à l’intérieur d’une vénérable bâtisse au bord d’un canal de l’élégant quartier de Prinsenhof, à deux pas du château des Comtes. Chambres confortables et modernes décorées sur la thématique des bandes dessinées. Excellent petit déjeuner buffet. Une bien belle adresse. Doubles à partir de 150 €.
– Flandria Hotel : Barrestraat, 3. Un petit hôtel sans prétention, à côté de Saint-Bavon, idéal pour les petits budgets. Doubles 65-95 €
– Brasserie Pakhuis : Schuurkenstraat, 4. Tlj sauf dim 12h-14h15, 18h30-23h (minuit ven-sam). Un ancien entrepôt surmonté d’une verrière transformé en élégant restaurant un tantinet chic. Dans l’assiette, une cuisine de brasserie haut de gamme très soignée avec une délicieuse touche locale (crevettes grises, jambonneau à la moutarde de Gand…). Bar à huîtres et bar avec un beau comptoir. Menus 43-54 € ; plats 20-40 €.
– Knol & Kool : Heilige-Geeststraat, 32. Tlj 11h (9h w-e)-16h. Un bar-resto vegan, mais aussi une boutique bio, dans un patio sous verrière, à proximité de Saint-Bavon. Petit déj, sandwichs, salades, soupes, formule brunch, plats... C’est bon, sain, moderne et cosy. Un bel exemple de Gand vegan friendly. Compter 15-20 €.
– Friterie Bij Filip : adossée au Vleeshuis face au Groentenmarkt, cette baraque à frites est une institution locale. Pas d’enseigne, on la repère à la (plus ou moins) longue file d’attente. Cornet de frites à partir de 2 € et quelques petits plats (carbonade, fricadelle…).
– Het Waterhuis aan de Bierkant : Groentenmarkt, 9. Tlj 11h-1h. Un haut lieu de la bière avec sa terrasse privilégiée au bord de la Lys en plein cœur du Gand touristique. Plus de 150 bières disponibles, dont une vingtaine à la pression.
– Trollekelder Café : Walter de Buckplein, 4. Tlj 16h-3h. Il y a des trolls dans la déco de ce café très animé et quelque peu déjanté... mais surtout quelque trois centaines de bières. Avis aux amateurs !
– De Dulle Griet : Vrijdagmarkt, 50. Tlj 12h (16h30 lun)-1h (19h30 dim). Dulle Griet (« Margot l’Enragée ») est une institution houblonnée de Gand. Quelque 500 sortes de bières disponibles dans un troquet sympa à la déco vintage.
– Tierenteyn-Verlent : Groentenmarkt, 3. Tlj 10h (13h lun)-18h, sauf dim. Une belle boutique à l’ancienne qui sert une fameuse moutarde préparée selon la même recette depuis le XIXe siècle, sans conservateurs, à base de grains noirs et vendue à la louche.
– Oud Huis Himschoot : Groentenmarkt, 1. Juste à côté du moutardier, voici la boulangerie la plus ancienne de Gand. On ne peut que saliver devant les différentes sortes de pain et de pâtisseries. Un voyage dans le temps très gourmand.
– Temmerman : Kraanlei, 79. Mer-sam 11h-12h45 et 14h-18h. Une vieille boutique du Patershol, où l’on peut acheter les fameux cuberdons (ou neuskes) de Gand, fourrés à la framboise, mais aussi les kletskoppen (fin biscuit à base d’amande). Également bonbons, spéculoos, pain d’épices… Très tentant tout ça !
Trouve votre hôtel à Gand
Texte : Jean-Philippe Damiani
Mise en ligne :